MARSTRAND - Histoire d'une île - page 126

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Marstrand faisaient envisager avec appréhension la perspective de leur
interruption soudaine - comme ç’avait déjà été le cas plusieurs fois dans le
passé.
Un certain nombre d’événements de nature inhabituelle, qui se
produisirent alors, furent également interprétés par des esprits peu experts
comme un présage de la fin de la période du hareng. Il en fut ainsi du fait que
des sirènes et des filles de la mer avaient été observées à maintes reprises sur les
côtes du Bohuslän et qu’une fois un navire avait été attaqué par un serpent de
mer. Il était question également d’un « homme de la mer » qui allait çà et là au
bord de l’eau portant à la mer deux gerbes de blé - avec bien d’autres histoires
dans le même style;
Mais le plus bizarre de ces signes avant-coureurs annonçant la chute de
Marstrand comme grande puissance fut le monstre remarquable qui vint au
monde dans une porcherie d’Oslo le 7 juillet 1581 et dont un dessin existant en
original unique à Copenhague donne une bonne idée. En Europe, à une époque
particulièrement portée à la superstition et où les gens considéraient le moindre
phénomène de la nature déviant de l’ordinaire en quoi que ce soit comme
signifiant le malheur, ce monstre fit sensation à un point qu’on ne saurait
imaginer.
Trois ans après la naissance dudit cochon parut ainsi un écrit rédigé en
langue allemande, ayant pour auteur, croit-on, un commerçant hanséatique qui
avait résidé au Bohuslän et en Norvège, et connaissait particulièrement bien
Marstrand.
Le titre de cet écrit était
Die nordtsche Saw
(La truie nordique) et il était
accompagné de dessins du monstre. L’auteur de l’époque développait ainsi son
interprétation de l’intention de Dieu que la naissance du cochon soit un
avertissement pour ces pécheurs qu’étaient les habitants de Marstrand : le
cochon représentait les mécréants qui menaient une existence épicurienne sans
implorer la grâce de Dieu ni faire rien de bon, une sorte de gens dont on trouvait
bon nombre en Norvège; ils plaisantent du signe qui est arrivé avec leurs
singeries (les oreilles de singe du cochon) ;
bien que voyants ils sont aveugles et
dorment dans leurs péchés, comme le lièvre
qui dort les yeux ouverts sans rien voir ; le
nez humain représente la puissante et puante
odeur de péché qui règne partout dans le
pays et qui pourtant n’est sentie ni reconnue
de personne ; la peau de femme blanche du
cochon représente la fornication à grande
échelle pratiquée par les marchands étrangers et locaux, particulièrement
pendant la pêche au hareng ; la corne signifie que tout le pays et en premier lieu
tout Marstrand sera puni et rétrogradera comme la corne se plie sur le dos.
Le hareng de la fin du mondez
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