Descendre la Volga - page 111

DE VOLGOGRAD A ASTRAKHAN
La distance de Volgograd à Astrakhan est de 500 km. Ce sera notre plus longue étape.
Le « Russ » va la couvrir en deux nuits et un jour. Pour la dernière fois le fleuve a changé de
direction et coule tout droit vers le sud-est en direction de la Caspienne
Nous avons franchi sans la voir, la nuit étant déjà tombée à notre départ de Volgograd,
l’entrée du canal Volga-Don, légèrement en aval de la ville, au lieu dit Krasnoameïsk. Le
canal Lénine de navigation Volga-Don relie la
au
le Tanaïs des Grecs) en leurs
points les plus rapprochés. Il est long de 101 km (dont 45 km de
et
. Sa
construction, planifiée et entreprise avant la
qui arrêta les travaux,
fut reprise et terminée entre
et
Il relie le bassin de la Volga et donc les mers du
Nord, avec la mer d’Azov et par conséquent avec la mer Noire et la Méditerranée.
Le projet a une longue histoire. Les premiers travaux furent faits par les Turcs
Ottomans en 1559 (six ans après la prise de Constantinople, quand rien ne semblait plus
devoir les arrêter). Après la prise d’Azov en 1696, Pierre le Grand reprit l’idée, mais cette fois
encore, faute de moyens et de persévérance, le chantier fut abandonné en 1701, remplacé par
un autre, sur un site beaucoup plus au nord, à la hauteur de Toula, qui devint le canal
Ivanovski, pour lequel 24 écluses furent construites entre 1701 et 1707, permettant le passage
de quelques centaines de navires. Quand la Russie dut abandonner Azov au traité du Prout de
1711, Pierre I
er
perdit tout intérêt pour l’opération et l’ouvrage tomba en ruine. Il devait
appartenir aux Soviétiques, spécialistes des grands travaux, de relancer la construction sur le
site initial. Le canal actuel, comprenant 13 écluses, fut ouvert à la navigation le 1
er
juin 1952,
moins d’un an avant la mort de Staline (5 mars 1953). Prokofiev célébra l’événement dans
son poème symphonique
La Rencontre de la Volga et du Don
.
Outre le transport de multiples matériaux lourds, le canal a servi à évacuer vers l’est le
charbon du Donetsk et vers l’ouest les produits pétroliers de la Caspienne. Aujourd’hui, du
fait de l’indépendance de l’Ukraine et des problèmes affectant l’est de ce pays, le trafic ouest-
est a fortement diminué. Dans les années 1980 avait commencé la construction d’un second
canal, Volga-Don 2, ouvrant sur la Volga près de Yerzovka en amont du barrage de
Volgograd, c’est-à-dire sur le « réservoir » avec l’avantage d’un nombre moindre d’écluses.
Cependant, pour des raisons financières, ce projet a été brutalement annulé le 1
er
août 1990
(quand Gorbatchev essayait de résorber le malaise qui aboutira au coup d’Etat du 19 août
1991). Un autre projet, ayant le soutien du Kazakhstan tout proche, est examiné actuellement :
celui du canal dit Eurasia, au sud du canal actuel, plus long mais nécessitant moins d’écluses,
constituant un lien beaucoup plus direct entre la Caspienne et la mer d’Azov.
Au petit matin – qui est déjà « grand matin » à notre lever car nous repartons à l’est
tout en restant dans le fuseau horaire de Moscou – nous trouvons devant nous le soleil levant
déjà haut dans le ciel tel un phare nous indiquant la route et éclairant pour nous la Volga. A
babord j’aperçois sur la rive toute proche un immense troupeau de moutons noirs, bien sûr, les
moutons d’Astrakhan, broutant sur la steppe. Je suis très excité, mais cette chance du matin ne
se renouvellera pas et à Astrakhan même nous saurons pourquoi. Des chevaux leur succèdent,
autre animal favori de la steppe, sur lesquels j’imagine les cavaliers mongols prêts à reprendre
leur élan vers les plaines russes. Je sais le Kazakhstan tout proche, à moins de 50 kilomètres,
1...,101,102,103,104,105,106,107,108,109,110 112,113,114,115,116,117,118,119,120,121,...152
Powered by FlippingBook