Descendre la Volga - page 50

NIJNI NOVGOROD
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1839 au soir : « Le site de Nijni est le plus beau que j’aie vu en Russie ; il y a là non plus de
petites falaises, de basses jetées qui se prolongent au bord d’un grand fleuve, des ondulations
de terrain qualifiées de collines au sein d’une vaste plaine : il y a une montagne, une vraie
montagne qui fait promontoire au confluent du Volga et de l’Oka, deux fleuves également
imposants, car, à son embouchure, l’Oka paraît aussi considérable que le Volga [ce n’est plus
le cas aujourd’hui, barrages aidant], et, s’il perd son nom, c’est qu’il ne vient pas d’aussi
loin… La foire se tient de l’autre côté de ce fleuve [l’Oka] sur une terre basse qui fait triangle
entre la rivière et le Volga… La foire de Nijni, devenue aujourd’hui la plus considérable de la
terre, est rendez-vous des peuples le plus étrangers les uns aux autres, et par conséquent les
plus divers dans leur aspect, dans leur costume et leur langage, dans leurs religions et dans
leurs mœurs… L’empereur Alexandre [I
er
, nous sommes en 1816, il vient de rentrer de Paris,
où il est retourné après Waterloo], après avoir choisi le nouvel emplacement de cette foire,
ordonna les travaux nécessaires à son établissement… D’immenses files de maisons, ou plutôt
de boutiques, séparent de longues et larges rues, au nombre de douze ou treize, je crois, qui se
terminent à une église russe [toujours présente] et à douze pavillons chinois… » (
La Russie en
1839
, lettre 33)
Custine est impressionné et même un peu déçu par l’ordre qui règne à cette foire :
« Cette foire occasionne peu de désordres ; en Russie, le désordre est chose inconnue ; il serait
un progrès, car il est fils de la liberté ; l’amour du gain et les besoins du luxe toujours
croissants, jusque chez les nations sauvages, font que même des populations à demi sauvages,
telles que celles qui viennent ici de la Perse et de la Boukarie [pays de Boukhara, dans
l’Ouzbékistan actuel], trouvent du bénéfice à la tranquillité, à la bonne foi : d’ailleurs il faut
avouer qu’en général les mahométans ont de la probité en affaires d’argent. »
Et d’ajouter, témoignage de quelqu’un qui fut sur place : ‘Là, au dehors, roulent les
chars, les brouettes ; là règnent le désordre, le bruit, la foule, les chants, les chants, la liberté
enfin ! Ici, au-dedans, on retrouve la régularité, le silence, la solitude, l’ordre, la police, en un
mot la Russie ! »
C’est aussi Custine qui nous donne ce détail sur les antécédents plus lointains de
l’événement : « Avant Makariev, c’était Kazan : on venait à Kazan des deux extrémités de
l’ancien monde : l’Europe occidentale et la Chine se donnaient rendez-vous dans l’ancienne
capitale de la Tartarie russe pour échanger leurs produits. »
Les quartiers de la foire deviennent un grand centre d'échanges, et de nombreuses
industries s'y installeront par la suite. Quand Michel Strogoff, le courrier du tsar, arrive à
Nijni Novgorod en chemin de fer dans les années 1870, il constate, nous dit son biographe
Jules Verne, que la ville, « qui en temps ordinaire ne compte que trente mille habitants, en
renfermait alors plus de trois cent mille, c’est-à-dire que sa population était décuplée. Cet
accroissement était dû à la célèbre foire qui se tient dans ses murs pendant une période de
trois semaines. »
Le premier réseau d'approvisionnement en eau est créé dans la ville en
Un
important centre industriel est construit dans les environs de Nijni Novgorod, à Sormovo en
Plus tard, il sera plus connu sous le nom d'« usine de Sormovo », et pendant la
sous le nom de
Krasnoïé Sormovo
(Sormovo rouge). À partir de
l'usine
produit des bateaux, et jusqu'à la
diversifie ses activités notamment avec la
production de wagons, de locomotives, de tramways et de diverses autres machines. Grâce à
son usine, Sormovo devint rapidement un grand centre industriel.
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