Descendre la Volga - page 59

NIJNI NOVGOROD
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Désiré Fuzzelier, quant à lui, protégé des funestes effets du froid par la capote du
gouverneur de Kostroma, poursuit, avec ses compagnons, sa route sur la rive droite de la
Volga ; il atteint Makariev, qui est encore pour quelques années la ville de la grande foire, et,
bien que la saison de cette foire annuelle, qui « se prolonge six semaines au plus », comme il
nous l’apprend lui-même, soit passée, il nous la décrit comme si elle était toujours en peine
action :
« Les baraques de la foire sont en planches : la plupart sont peintes. Elles forment
plusieurs rues. Parmi les marchands, on observe les Russes qui viennent de Saint-Pétersbourg
et de Moscou. Mais la plus grande partie se compose de Tartares, de Sibériens, d’Allemands,
de Turcs, de Chinois, d’Indiens, de Persans, d’Anglais, d’Italiens, de Napolitains, de Suédois,
etc ., etc., de quelques américains, enfin de presque toutes les nations. On y trouve du vin, des
fruits secs, des marchandises de toute espèce et de toutes qualités. On y voit beaucoup de
cafés, des restaurations et même des maisons de femmes prostituées. On remarque parmi ces
femmes les Géorgiennes qui joignent à leur beauté la douceur et les grâces. Je ne m’étonne
plus si quelques auteurs ont été tentés de placer en Géorgie le berceau du genre humain. C’est
en effet là, où la beauté du visage, l’élégance des formes et la blancheur de la peau se sont
conservées dans toute leur pureté. Enfin on trouve dans cette foire tout ce qui peut satisfaire et
flatter un voyageur curieux et aimant à se distraire. »
Il semble que les Géorgiennes, qui lui inspirent cet éloge dithyrambique, ait prolongé
leur séjour au-delà du temps officiel de la foire !
Aujourd’hui le site de la foire mondiale, c’est Internet. On s’y promène en restant chez
soi. A-t-on gagné au change ? Il est vrai que les Géorgiennes ou leurs consœurs sont toujours
là pour nous induire en tentation.
Les miasmes qui ont terrassé le marquis de Custine ayant disparu depuis ces temps
héroïques, la météo nous favorisant, aucun de nous ne manifestant un tempérament
incompatible avec la Volga ou ses rives, n’étant pas lassés du « rabâchage d’architecture »,
nous confions sans arrière-pensée nos destinées au fleuve qui nous emmène maintenant plein
est, vers la capitale des khans. Mais un autre arrêt et non des moins spectaculaires, nous a été
ménagé avant Kazan.
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