MOSCOU ET LE CANAL MOSCOU-VOLGA
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La nuit tombe tôt à Moscou pour cause de fuseau horaire, les autorités ayant choisi de
réduire à une heure au lieu de deux le décalage horaire estival avec l’Europe. C’est ce
décalage horaire, de deux heures à l’époque, qui fit que la capitulation allemande de 1945,
signée par Joukov « pour le commandement suprême de l’Armée rouge », de Lattre,
« commandant en chef de la 1
ère
armée française », étant témoin, à 23 H le 8 mai à Berlin, le
fut, vue de Moscou, à 1 H le 9 mai, jour où là-bas elle est célébrée depuis. Ne sommes-nous
pas l’année du soixante-dixième anniversaire de la fin de la Grande Guerre patriotique ? Nous
allons nous en apercevoir bientôt.
Cependant la lumière des réverbères nous révèle la longue silhouette de notre navire.
C’est le « Russ » [РУСЪ], portant fièrement à son étrave le nom de la première Russie, celle
de Kiev, fondée par le Varègue (autrement dit Suédois) Rurik, comme trois siècles et demi
plus tôt la France l’avait été par le Germain Clovis. Le bâtiment que nous avons sous les yeux
appartient à la société « Vodokhod »
ou « Qui va sur l’eau », dont le nom, de bon augure,
s’affiche également, en lettres rouges, en milieu de coque cette fois, sur le bastingage du pont
des canots. Nous montons aussitôt à bord, où nous sommes accueillis, en présence d’officiers
du bord rangés discrètement sur le côté, par une dame en costume traditionnel nous offrant le
pain et le sel. Arrivé dans les derniers, je me retourne pour tremper à nouveau dans le dit sel le
bout de pain qui me reste, mais la dame a déjà disparu. Si le sel s’enfuit, avec quoi salera-t-
on !
Quelques mots maintenant sur notre bateau, le « Russ », construit en 1987 dans un
chantier naval de l’Allemagne de l’Est, la notorieuse DDR, pôle industriel de ce qui était à
l’époque le bloc communiste, et rénové en 2012. Sa longueur est de130 mètres et sa largeur
de 17 mètres. Il y a à bord 145 cabines réparties en quatre ponts, dont le pont des canots, où
sont les nôtres, plus tout en haut le « pont du soleil », où se trouve la salle de conférence. Les
services comprennent en outre le restaurant, les deux bars, le salon musical, la boutique de
souvenirs, la blanchisserie et salle de repassage. Il y a aussi le sauna, mais nul d’entre nous
n’est adepte de ce traitement de choc dont les peuples du Nord – et les Russes en particulier –
font grand cas..
La vitesse de croisière du « Russ » est de 26 km/h, soit 624 km en 24 H. Nous avons
quelque 3.300 km à parcourir. Il faut cependant compter avec les écluses et surtout les
escales. Au total les neuf jours et demi que nous serons en mouvement ne seront pas de trop.
Au comptoir de réception dans le carré d’entrée, un essaim de jeunes opératrices en
corsage blanc et tablier bleu roi nous échange clé de cabine contre passeport. A peine installés
dans nos étroites mais confortables cabines, remarquablement aménagées pour un séjour de
longue durée (nous devons y passer douze nuits), nous sommes invités à rejoindre en salle de
conférence Marc, notre accompagnateur en chef, Celui-ci nous informe que nous sommes 56
croisiéristes de la société strasbourgeoise qui nous a vendu le voyage, sur un total de 250
passagers de toutes nationalités, Russes compris – dont un bon nombre nous quitteront à mi
trajet, à Nijni-Novgorod (pourquoi en ce lieu précis nous le comprendrons plus tard). Nous
sommes divisés en deux groupes, de taille opérationnelle ; notre petite équipe sera du groupe
2. Aux escales nous échangerons nos clés de cabine contre des écouteurs, qui nous
permettront de recevoir les explications du ou de la guide sans avoir à nous agglutiner autour
de lui ou d’elle. Marc nous présente le parcours qui nous attend et nous propose deux
excursions optionnelles, à Iochkar-Ola chez les Maris (mais oui, c’est bien leur nom !), lors de
l’escale de Tchéboksary, et dans le delta de la Volga à partir d’Astrakhan. Nous décidons de
les faire toutes les deux et en parlerons quand leur temps viendra. Bonne nouvelle : les pluies
d’août ont relevé le niveau d’eau dans les réservoirs, il ne sera donc pas nécessaire de
procéder au transbordement annoncé. Une nouvelle d’autant meilleure qu’elle s’accompagne
de prévisions météorologiques positives pour la période qui s’ouvre (sauf demain où il
pleuvra). Petite déception en revanche : nous apprenons que nous ne verrons pas la
